
Come from Away débarque Down Under
Leur comédie musicale à succès a débuté à New York, et à Toronto et sera en 2019 à Melbourne, mais pour cette équipe composée du couple mari et femme auteurs de Come from Away, c’est la toute première nuit dans une minuscule bourgade canadienne de la côte Est qui leur a donné le plus le trac.
Gander, une ville de la province de Terre-Neuve et Labrador, sert de décor à cette extraordinaire comédie musicale à succès écrite par David Hein et Irène Sankoff dans la période qui a suivi immédiatement l’attentat terroriste du 11 Septembre 2001. Pendant cette période frénétique, deux cents avions de ligne ont été redirigés des États-Unis vers le Canada, dont 38 avec 6600 personnes à leur bord sur Gander, une ville dont la population est normalement de 10 000 habitants seulement.
Irène et David y ont démarré leur spectacle en 2016 peu avant l’ouverture à Broadway.
“Oh mon Dieu, c’était comme si notre mariage, notre bal de fin d’année et la naissance de notre enfant, tout cela arrivait en même temps, et ce en face de 2500 personnes. On a eu plus le trac ce soir-là que lors de tout autre première, même à Broadway, nous déclare Sankoff.”
“On voulait vraiment que les habitants de Gander soient fiers de nous, parce que si on n’avait pas leur accord et qu’on n’avait pas raconté leur histoire telle qu’ils l’avaient vécue, à quoi bon ?”
Et Hein d’acquiescer.
“On n’a jamais pensé produire notre spectacle à Broadway et encore moins en Australie, nous dit-il en riant !”
“Notre but c’était de raconter la vérité et de leur donner la parole sur ce qui était arrivé’.”
Pour les deux auteurs, l’histoire de ce qui est arrivé à Gander, ainsi que dans de nombreuses autres villes canadiennes qui ont accueilli des passagers bloqués, avait sens à leurs yeux à cause de ce qu’ils avaient vécu pendant les attentats.
“Nous sommes Canadiens, de toute évidence, nous explique Hein, mais nous habitions à New York le 11 septembre, dans une résidence appelée Maison internationale, qui est une résidence internationale pour étudiants, il y avait donc des étudiants canadiens et des étudiants du monde entier.”
“Ce jour du 11 septembre on a fait l’expérience d’une communauté dans laquelle les gens prenaient soin les uns des autres – nos voisins sont venus nous voir, ils ont frappé à notre porte peu après l’attentat et on s’est tous retrouvés en communauté. On savait que des avions avaient été redirigés vers le Canada mais on ignorait le fin fonds de l’histoire. Quand on a commencé notre recherche ça nous a touché parce qu’on se rappelait la gentillesse de cette communauté internationale dont on a fait l’expérience.”
C’est dix ans après ces évènements que Sankoff et Hein ont pris la décision de creuser cette histoire, de retrouver ce qui s’était passé à Gander. Et ce sont les habitants de la ville qui furent la véritable inspiration pour les personnages de leur spectacle et autour desquels le spectacle a pris forme.
“On a sollicité une subvention du Conseil des arts du Canada et du Conseil des arts de l’Ontario qui nous ont envoyés à Terre-Neuve pour près d’un mois ; en fait on y est restés plus longtemps, nous dit Hein, parce que les Terre-Neuviens ne voulaient pas qu’on dépense notre argent dans des hôtels.”
“On a interviewé le plus de personnes possibles et on est rentrés avec des milliers d’histoires, chacune d’entre elles meilleure que la suivante.”
Tous deux voient Come from Away comme une histoire universelle d’espoir, d’attention et d’unité, et vu que Gander fut le refuge de personnes venues du monde entier, c’est définitivement une histoire de caractère mondial.
“Le monde entier a échoué à Gander… mais d’un autre côté c’est une histoire internationale et universelle, nous dit Hein, parce que partout où on présente le spectacle les gens s’y retrouvent.”
“ Ce jour-là on était tous dans le même bateau, tous dans le même instant, on voulait tous s’entraider, on se sentait tous démunis, et jour après jour on s’y retrouve encore parce qu’on traverse des moments où on ressent la même tragédie et on veut apporter notre aide quelle qu’elle soit.”
Mais c’est également une histoire spécifiquement Canadienne et pas seulement parce que les avions ont atterri au Canada. Pour Sankoff, le soutien à la comédie musicale a démarré au Canada bien avant que l’idée en soit évoquée.
“Retour au lycée, s’écrie-t-elle !”
“Je suis allée au lycée, lycée public où les arts étaient encouragés, j’ai bénéficié d’une aide sociale, j’ai obtenu l’OSAP, Plan d’aide aux étudiants de l’Ontario, avec des subventions et des bourses, l’éducation supérieure est raisonnablement accessible au Canada.”
Et du concept à la création, pour Hein le Canada dans son ensemble fait partie du collectif.
“On a reçu le soutien de subventions municipales, provinciales et fédérales tout au long de notre carrière. De plus, dit-il, bénéficier du soutien d’un pays tout entier pour son spectacle comme message porteur pour le Canada et pour notre identité culturelle, c’est sacrément important.”
“J’ai grandi au Saskatchewan, et puis je suis venu à Ottawa, et pour la Fête du Canada je peignais sur mon visage une feuille d’érable, je descendais la rue en courant avec un drapeau canadien en écharpe, je parie qu’on ne peut pas trouver plus patriotique ni plus fier que moi, et quand je retrouve le soutien du pays entier pour cette aventure, c’est compte énormément.”
C’est le premier voyage du couple en Australie et quand le spectacle débutera à Melbourne en juillet 2019, tous deux vont rester et s’impliquer dans la nouvelle production. Ils sont confiants que les Australiens auront le même sentiment de chaleur et de connexion avec le spectacle que ce qu’ils ont vécu dans le reste du monde.
“Et même d’être tout simplement ici, on se sent comme chez nous, ça ressemble beaucoup au Canada, dit Sankoff, je dois admettre que j’en suis plutôt surprise.”
Hein est d’accord avec sa femme.
“On nous a dit souvent que quand on est loin de chez nous, on doit chercher des Australiens parce qu’avec eux on partage le même sens de l’humour, les mêmes valeurs, ce sont de braves gens, c’est prouvé, ils nous ont accueilli les bras grands ouverts, tout comme à Gander.”
L’équipe de Come from Away, David Hein and Irène Sankoff, sont en Australie grâce au soutien du Consulat général du Canada, Sydney, et grâce au Fonds culturel de Mission des Affaires mondiales du Canada.