Le leadership du Canada une réalité virtuelle
En Octobre dernier, au cœur de l’une des destinations les plus belles et les plus détendues d’Australie, le plus important festival cinématographique régional d’Australie, le Festival du Film de Byron Bay a célébré son 10ème anniversaire.
En 2016, ce festival organisé sur la côte nord de Nouvelle Galles du Sud ne s’est pas contenté de présenter des films australiens et d’autres pays, il a aussi invité des experts internationaux de l’une des industries créatives à l’expansion la plus rapide au monde : la réalité virtuelle.
La conférence co_lab_create du festival a ainsi réuni des spécialistes en réalité virtuelle et augmentée pour échanger sur les progrès, tendances et technologie, et le leadership du Canada dans ce domaine s’est affirmé en première ligne de cet évènement.
Stephan Dubreuil de WOOLF + LAPIN, une compagnie de Montréal spécialisée dans le développement de créations pour la réalité virtuelle, y participait et il a servi de modérateur dans une discussion sur les possibilités de la VR comme élément du récit. Il a expliqué que le Canada et le Québec en particulier sont un hub pour la VR.
“Cela, nous a déclaré Dubreuil, fait partie de notre culture; nous avons financé les arts parce que nous estimons que c’est la voix de notre culture, de notre nation, même petite, et tout cela rebondit sur la scène internationale.”
“Lorsque vous avez le terrain propice, cela encourage plus de personnes à s’y intéresser, il y a donc comme une réaction en chaîne de gens qui franchissent le pas, qui prennent le risque, et au Canada on a un esprit d’entrepreneur.”
Accompagnant cet esprit d’entreprise, les organisations canadiennes qui travaillent dans la VR ont reçu le soutien d’institutions gouvernementales désireuses de voir plus loin que par le bout de la lorgnette.
“Les principales institutions de financement telles que Telefilm et Canadian Media Fund, se sont investies dans les discussions, dit-il, elles ont participé aux conférences et ont rejoint cette petite société organique en nous encourageant à leur envoyer nos candidatures, à leur envoyer nos projets.”
“Et chapeau à ces dirigeants d’institutions qui ont su reconnaître la valeur, la qualité de la VR émergeant de ce pays pour gagner l’attention internationale ! Alors pour eux avoir associé le logo CMF à cette entreprise ça tient la route financièrement et politiquement.”
Bien que la VR/AR ait fait le buzz depuis plusieurs années, elle a eu du mal à sortir de l’image de gadget ou de truc réservé aux joueurs de haut niveau, pour finalement devenir un medium utilisé largement. Dubreuil espère que le développement d’un bon réseau et du savoir dès les premières étapes du mouvement placera WOOLF + LAPIN en bonne position pour tirer bénéfice de ce qu’il espère être un déferlement dans l’adoption par les utilisateurs.
“Si on regarde l’internet, ajoute-t-il, beaucoup de gens sont restés sur la ligne se demandant ce qui allait se passer, et puis ça s’est développé de plus en plus, et ceux qui ont voulu se lancer trop tard ont raté l’opportunité.”
“Pour l’instant, la VR n’est qu’un composant, une boutique éphémère. Pas encore à grande échelle, mais je pense que si les investisseurs s’y mettent, et si plus de compagnies s’impliquent, ce sera plus qu’une petite excitation, ça deviendra une nouvelle façon de vivre à l’avenir.”
Récemment l’adoption massive de PokemonGo, un jeu style réalité augmentée que les utilisateurs peuvent télécharger sur leurs portables, a donné une petite idée du potentiel de ce medium.
“Je pense, déclare Dubreuil, que des phénomènes comme ceux-là [Pokemon GO] sont toujours de bonne augure, parce qu’ils aident les autres à penser que c’est en fin de compte créatif, que c’est un essai au hasard.”
“Tout est question de progression; il ne s’agit pas d’un grand mouvement instantané qu’on adopte tout d’un coup, je pense que notre conscience est titillée dans une certaine direction, et que l’adoption en masse suit de tels exemples.”
D’après Timur Musabay, co-fondateur et directeur de Occupied VR Inc., dont la base est à Toronto, une invitation de l’industrie cinématographique à faire plus de films au Canada a en quelque sorte provoqué un appel d’air et accéléré la progression.
“Hollywood, explique Musabay, vient au Canada pour les tournages et la postproduction, tellement même que nous avons dû lancer un nombre incroyable de sociétés de postproduction qui doivent sans cesse repousser les limites pour attirer les dollars de ce côté de la frontière.”
“Et tout cela se transmet directement dans les domaines de la VR/AR qui ne sont qu’une extension de ce monde. Personnellement je placerai le Canada en haut de la liste des pays qui sont au premier plan de la VR/AR.”
Occupied VR se spécialise dans le développement de la vision utilisée dans les casques de Réalité Virtuelle, et Musabay estime que les utilisations potentielles de ce medium, en dehors des jeux et des films, pourraient se révéler extraordinaires.
“En dehors du potentiel de divertissement évident, la VR, affirme-t-il, renferme un potentiel illimité dans les domaines de l’éducation, et de la médecine par exemple.”
“La possibilité de transporter des étudiants dans différents lieux et différents moments de l’histoire peut avoir sur un esprit en développement un impact bien plus fort qu’un manuel ou une simple lecture. D’ores et déjà utilisée dans plusieurs spécialisations médicales, la VR permet aux docteurs d’examiner et de disséquer des parties du corps comme jamais auparavant ; améliorant ainsi leurs chances d’un diagnostic pointu.
“La VR peut aussi permettre aux médecins de se miniaturiser et par l’examen des patients avec l’aide des caméras endoscopique POV voir d’un œil nouveau les maladies, la structure et le fonctionnement du corps humain. Avec la VR, on a déjà aussi procédé à de nombreux examens pour le traitement des maladies mentales telles que l’ESPT (l’état de stress post-traumatique). Ses utilisations en dehors du divertissement sont sans limites.”
Le potentiel est immense pour un scénario en VR et pour transporter l’utilisateur dans des endroits et environnements inhabituels, ce qui selon Musabay facilitera un partage des affinités et donnera aux gens une meilleure compréhension de ce que les autres sont contraints de vivre, avec à la clé peut-être une solution pour résoudre les inégalités.
“Occupied, dit-il, a récemment terminé avec Vice un projet VR interactif nommé “Cut-Off’ qui décrit les conditions horribles que doivent subir au quotidien les membres de nos Premières Nations du Canada. ”
“Nous sommes allés dans les communautés de Shoal Lake 40 et de Cross Lake, toutes deux victimes de problèmes très graves tels que la pénurie d’eau potable et l’épidémie de suicides de jeunes, ce qui est absolument bouleversant et enrageant. Nous nous sommes concentrés à donner la parole aux résidents qui ont raconté leur histoire sans aucune censure.
“C’est un problème que notre pays ne peut plus se permettre d’ignorer; ils ont besoin d’une voix et nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les aider.”
Pour Musabay, l’expérience vécue à Byron Bay a été incroyablement enrichissante.
“Elle réduit les frontières, dit-il, et permet à des gens qui partagent les même idées de se rencontrer et de produire des résultats bien mieux que les courriels ou Skype. ”
“Avec d’autres participants, nous avons tissé des liens personnels que nous pourrons utiliser dans notre milieu professionnel. De plus, les discussions que nous avons eues étaient vraiment libres et intelligentes, c’est tout ce qu’on pouvait espérer.”
La directrice du festival, J’aimee Skippon-Volke, a déclaré que l’addition de l’élément VR a été essentielle pour s’assurer que le festival est bien à l’avant-garde de la technologie et du progrès du cinéma.
“La Réalité Virtuelle et Augmentée représente, déclare-t-elle, l’avenir du récit.”
“Ce sont des nouveaux mediums qui attirent et fascinent la majorité de ceux qui entrent pour la première fois et à qui on offre une expérience VR de qualité. En tant que festival de cinéma, nous souhaitons évoluer avec notre public et le guider, et la VR nous permet de partir à l’aventure, ensemble.”
Elle pense que les collaborations et les réseaux qui se sont développés pendant le festival aideront à comprendre les possibilités de la VR comme véhicule de divertissement.
“Comme il s’agit d’une industrie et d’une technologie innovantes, ajoute-t-elle, nous en sommes tous au stade de l’apprentissage, et le partage des connaissances aidera à inclure cette technologie dans une meilleure expérience de divertissement pour le public.”
“Nous savons que nous pouvons continuer cet état d’esprit dans ce nouveau medium, et au final créer des opportunités et en faire profiter tout le monde.”