
Sous ses lèvres : une histoire d’amour sous un jour différent
Au premier regard, le film de April Mullen Sous ses lèvres pourrait ressembler à une histoire passionnelle très ordinaire, bien qu’étrange. En y regardant de plus près pourtant c’est un film qui comble une lacune et convient à un public en quête d’une histoire présentée différemment.
Le film se concentre sur la rencontre entre deux personnages Jasmine (Natalie Krill) et Dallas (Erika Linder) qui se lancent dans une histoire d’amour passionnée. Située et filmée à Toronto, cette production est l’œuvre d’une équipe entièrement féminine qui, selon la réalisatrice April Mullen, a pu offrir un environnement confortable et sûr pour toutes les participantes.
“Nous avons décidé, explique Mullen, de n’engager que des femmes, et donc le moindre élément à partir des étapes de pré- production a reçu une perspective féminine ou une touche féminine aussi authentique et fraîche que possible.”
“On a pu ainsi toutes se lâcher et dire ‘c’est ok, c’est ce que nous sommes’, et ça c’était agréable parce qu’on sentait qu’on était sur un but commun, qu’on travaillait ensemble collectivement, et on a reçu tant d’encouragement et de soutien, que les deux actrices étaient à l’aise quand il a fallu qu’elles s’exposent.”
Ce film applaudi au Festival du Film du Mardi Gras de Sydney, pose un regard profond sur une connexion d’une forte intensité entre deux personnes, et partir à la recherche de ce qui peut arriver dans ces moments- là, c’est ce qui a attiré Mullen vers un tel projet.
“J’ai toujours été intéressée, dit-elle, par les raisons qui font que deux personnes aient envie de nouer des liens, par cette réaction chimique entre deux êtres, et comment il se fait que lorsqu’on rencontre quelqu’un parfois il y a en quelque sorte de l’électricité dans l’air et on veut se lancer à la découverte du corps de l’autre, tout ça me fascine.”
“[ Sous ses lèvres] explore le processus chimique entre ces deux filles, et le mettre en évidence, avoir cette impression de liberté, se lancer à corps perdus dans la passion, c’est ce qui m’a interpellé.”
Avec un sujet d’une telle intensité, le succès du film dépendait du choix des actrices : il fallait qu’elles soient capables de donner la combinaison parfaite. Et pour Mullen, l’équipe a senti la pression.
“Au moment de choisir les actrices, dit-elle, c’est ensemble qu’on a décidé que si on ne trouvait pas les deux actrices parfaites, on ne ferait pas le film, et donc tout dépendait du charisme, du charme et de la fougue que le personnage de Dallas devait incarner.”
“On voulait vraiment que ça soit authentique et mettre face à face femme avec femme, et quand j’ai découvert le visage de Erika Linder en noir et blanc sur Internet, je me suis dit : ‘Voilà Dallas’, je ne savais même pas si elle parlait anglais, c’était un super mannequin suédois, il fallait que je la déniche.
“Quand on a trouvé Natalie Krill, elle avait ce sens de l’émerveillement saugrenu, elle était très pure émotionnellement, vulnérable et transparente, et cette union de force et de transparence a fait en quelque sorte surgir ce moment de fusion parfaite, quand on les a vues ensemble pour la première fois, c’était très évident.”
Tourner le film à Toronto ne s’est pas fait par accident non plus. Pour Mullen, la ville est la représentation vivante de l’inclusivité, de l’égalité et de l’amour dont c’est l’objet dans le film.
“C’est une histoire d’amour pour Toronto, dit-elle, une histoire de gratitude parce que les créatrices peuvent y être libres, les gens peuvent être libres, l’amour c’est l’amour, et on a toujours eu cette approche du multiculturalisme, du genre, etc. ”
“Je pense plus que jamais que le fait qu’au Canada on puisse tout simplement s’exprimer sans obstacles, ni restrictions, et en tant qu’artistes avoir un sens de la liberté pour exprimer ce que l’on veut sur les écrans, c’est vraiment important, et c’est important dans un cadre plus général en tant que message au reste du monde de montrer ce qui est accepté et ce qui est si complètement le bienvenu au Canada.”
Puisque c’est un film qui parle de lesbiennes, on pourrait penser au premier abord qu’il est réservé à un public particulier; pourtant Mullen déclare qu’elle a été surprise de cette soif d’histoire d’amour différente vu d’un œil différent.
“Ce que j’ai trouvé grâce à ce film, dit-elle, c’est qu’il existe un désir profond pour une ouverture en général, positive, très libérée, célébrant la sexualité, alors ça vient plutôt de la jeune génération qui ne se retrouve pas sur les écrans.”
“Les jeunes cherchent des films qui enfoncent les barrières, qui n’ont pas peur ni honte de célébrer la sexualité, c’est dans cette magnifique nouvelle jeune génération qu’on trouve ceux qui poussent le marché et qui crèvent d’envie d’une alternative et d’une nouvelle approche de l’amour, je pense que le film s’adresse vraiment à eux, et ça je ne le savais pas quand on s’est lancé.”